Sindbad PUZZLE

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lundi 13 septembre 2010

Un Muharram oecuménique à Hyderabad

Procession lors de la célébration du Muharram à Hyderabad. Photo prise en 1880


Le Muharram est l'une des fêtes religieuses chiites parmi les plus importantes. Elle commémore le massacre de Hussain, le petit-fils du Prophète, et de ses compagnons à Karbala en 680 devant les troupes du calife omeyyade Yazid.
On a toujours tendance à voir les relations entre musulmans et hindous en Inde comme conflictuelles voire haineuses. L'extrait ci-dessous montre que des périodes de tolérance ont existé entre les deux communautés. Il n'était pas rare de voir, lors des festivités religieuses, hindous et musulmans saisis d'une même joie oecuménique et prendre part ensemble aux commémorations d'une fête religieuse appartenant à la communauté de l'autre. L'empereur moghol Akbar avait décrété que même les hindous faisaient partie des Gens du Livre (Ahl al-Kitab), comme les chrétiens et les juifs, puisqu'ils possédaient les Védas et la Bhagavad Gita, et que par conséquent ils méritaient le respect et la protection des musulmans. Ce n'est véritablement qu'à partir du début du XXe siècle que hindous et musulmans ont commencé à s'éloigner les uns des autres ; éloignement favorisé par les Anglais qui surent habilement mettre en pratique le fameux principe consistant à diviser pour régner. Les événements douloureux liés à la partition de l'Inde qui provoquèrent de terribles massacres n'ont fait que davantage creuser le fossé entre les deux communautés.
On a toujours tendance à mettre en avant les guerres de religions. Il convient également d'évoquer et de se souvenir de ces périodes où la paix, le respect de l'autre et la tolérance ont régné entre les différentes communautés. C'est ce que nous montre l'extrait ci-dessous tiré du journal d'un témoin oculaire de la célébration du Muharram à Hyderabad au début du XIXe siècle :

"Musulmans et hindous prennent part ensemble à ces célébrations, et le dixième jour, celui du martyre, tous les étendards, tous les taziahs [spectacles] et toutes les statues de chevaux ailés en bois [représentations de Buraq, le cheval ailé sur lequel le Prophète fut emporté au Ciel lors de son Ascension nocturne] descendent la rue Hussaini Alam jusqu’à la rivière Musi, accompagné par des éléphants, des fanfares, des troupes de cipayes en uniforme arabe et européen […]. Hindous et musulmans suivent par milliers, tête et pieds nus, se martelant le torse en criant : « Husain ! Husain ! » Les hindous en particulier participent avec le plus grand sérieux, nouant de leurs mains des guirlandes de fleurs aux étendards […]. Riches ou pauvres, toutes les personnes valides franchissent la vénérable porte du Pont. Les mendiants en deux processions derrière leurs chefs rivaux, les derviches, les aliénés déguisés en pirates, en lions, etc., tous se dirigent vers la rivière en louant Ali et y passent la nuit. Ils sont au moins cinquante mille, sans compter les éléphants, certains porteurs de parfums pour en asperger la foule, et le innombrables chevaux, et toutes les tentes que ceux qui le peuvent dressent sur la berge. Il n’est aucun spectacle plus merveilleux à Hyderabad !"

Extrait tiré de Le Moghol Blanc, William Dalrymple, éditions Noir sur Blanc, pp. 326-7

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